
Il est extrêmement intéressant de mettre en parallèle les travaux de Marc Halévy avec ceux de Clare W. Graves[1], engagé depuis plus de 25 ans dans des travaux sur la spirale dynamique. Ce modèle a lui aussi pour but de comprendre le changement de monde auquel nous assistons, et nous allons voir que leurs apports sont incroyablement complémentaires.
Selon le modèle de la spirale dynamique, l’humanité, pour évoluer, est passée successivement par des phases individuelles (moi) et des phases collectives (nous), l’une succédant à l’autre et ainsi de suite. Cette évolution, selon les auteurs, est à mettre en parallèle avec la transformation de chaque être humain, du bébé à l’adulte accompli. Chacun de nous, en grandissant, passe par des moments d’affirmation personnelle (par exemple l’adolescent ou encore l’enfant de 3 ans aimant répondre « non » à chaque proposition qui lui est faite) et par des moments d’attachement profond au collectif (par exemple l’enfant de 7-8 ans ayant à cœur de respecter et de faire respecter toutes les règles de la communauté : « Papa, mets ta ceinture ! », « Maman, on ne dit pas de gros mots », etc.).
Clare W. Graves affirme ainsi, à travers la spirale dynamique, que nous sommes en train de passer d’une phase profondément individuelle à une phase profondément collective. Ce qui constitue un réel changement. Celle que nous quittons progressivement a connu son âge d’or au moment des Trente Glorieuses, elle érigeait la propriété en Graal absolu, avec son moteur, l’argent, qu’il fallait accumuler pour exister. La nouvelle phase qui commence à remplacer l’ancienne s’éloignera progressivement de cet individualisme pour tendre vers l’harmonie. Ainsi, pour l’Humanité, il conviendra désormais de vivre dans des organisations harmonieuses, mais aussi en harmonie avec leur environnement.
Chaque être humain devra avoir sa place dans la communauté, toutes les voix seront écoutées afin d’obtenir un consensus car l’avis de la majorité ne sera plus suffisant, chacun agira pour l’intérêt général et sera prêt à sacrifier son intérêt personnel pour ne pas nuire à l’harmonie existante. Ensuite, la communauté adoptera un style de vie en adéquation avec le monde qui l’entoure, et en particulier avec la nature. Ce monde vous paraît parfaitement utopique ? Peut-être, mais qui aurait pu imaginer il y a 20 ans le monde actuel, et notamment l’impact des nouvelles technologies sur nos vies ? Demain, cette technologie sera au service de la vie, sous toutes ses formes, humaine, animale et végétale.
[1] Professeur de psychologie américain (1914-1986). Il est à l’origine d’une théorie en psychologie évolutionniste.